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LA GAULE SOUS L’EMPIRE. DÉCADENCE DE L’EMPIRE.

hellénique et « la hauteur du cothurne gaulois. » Il l’appelle « le Rhône de la langue latine. » « L’Église chrétienne, dit-il encore, a grandi et crû à l’ombre de deux arbres, saint Hilaire et saint Cyprien (la Gaule et l’Afrique). »

Jusque-là l’Église gauloise suit le mouvement de l’Église universelle ; elle s’y associe. La question du manichéisme est celle de Dieu et du monde ; celle de l’arianisme est celle du Christ, de l’Homme-Dieu. La polémique va descendre à l’homme même, et c’est alors que la Gaule prendra la parole en son nom. À l’époque même où elle vient de donner à Rome l’empereur auvergnat Avitus, où l’Auvergne sous les Ferreol et les Appolinaire semble vouloir former une puissance indépendante entre les Goths déjà établis au Midi, et les Francs qui vont venir du Nord ; à cette époque, dis-je, la Gaule réclame aussi une existence indépendante dans la sphère de la pensée. Elle prononce par la bouche de Pélage ce grand nom de la Liberté humaine que l’Occident ne doit plus oublier.

Pourquoi y a-t-il du mal au monde ? Voilà le point de départ de cette dispute[1]. Le manichéisme oriental répond : Le mal est un Dieu, c’est-à-dire un principe inconnu. C’est ne rien répondre, et donner son ignorance pour explication. Le christianisme répond : Le mal est sorti de la liberté humaine, non pas de

  1. Euseb., Hist. eccl., V. 37, ap. Gieseler’s Kirchengeschichte, I, 139, Πολυθρύλητον παρὰ τοῖς αἱρεσιώταις ζήτημα τὸ πόθεν ἡ κακία ; — Tertullian., de Præscr. hæret., c. vii, ibid. : « Eædem materiæ apud hæreticos et philosophos volutantur, iidem retractus implicantur, unde malum et quare ? et unde homo et quomodo ?  »