ne sais. Les arbres avaient des feuilles rousses lorsque nous avons commencé ce charroi ; puis, l’air est devenu plus vif. Des rafales blondes nous ont assaillis, recouvrant notre chargement, et Henriette nous a fait la remarque que nous semblions rapporter un plein rack de feuilles mortes. Un matin, il a fait froid. Le manche luisant de la fourche glissait entre les grosses mitaines. Mourier grommelait : « Pourquoi ne faisons-nous pas comme les autres qui attendent les chemins de sleighs pour rentrer leur foin ? Au moins si l’on a froid, on peut charger du « redouble »…
Je l’ai laissé dire. Je sais que cet hiver, il se frottera les mains de contentement, en voyant les Bourgeois passer avec leurs voyages de foin. « Il fait meilleur au coin du feu, demoiselle ! »
Deux journées de travail encore et nous aurons fini. Même si l’hiver était très long et rigoureux et si nos bêtes ne peuvent se rendre aux meulons de paille, nous aurons assez de fourrage pour les hiverner jusqu’en avril.
Ce soir nous avons eu des « veilleux ». C’étaient les Labbé et la nouvelle maîtresse d’école qui prend pension chez eux et qu’on voulait nous présenter tout d’abord, un peu à cause du respect attaché à la mémoire de mon père qui fut si longtemps président de la Commission scolaire.
— Une belle créature, me dit le grand Fred avec un clignement d’œil connaisseur.