tion de terrains supposés pétrolifères : on intrigue ferme pour obtenir des parts. Toutes ces volontés, tendues âprement vers la richesse, créent dans la rue une atmosphère indéfinissable.
Cependant, ce matin, comme je descendais la Jasper, mon attention fut attirée par un groupe de cinq hommes qui discutaient avec animation. Aux gestes vifs, à ce je ne sais quoi qui différencie les types des diverses nationalités, avant de les entendre, je reconnus des Français. Ils ne parlaient pas de pétrole. Les yeux ardents, la parole rapide, ils formaient un îlot moralement plus distant des autres qu’il ne l’était en réalité. Un long policeman s’approcha, une seconde, les fit paraître petits. Ils ne le virent pas s’arrêter, l’oreille aux aguets, mis en défiance par la discussion en langue étrangère. Quelques mots brefs, reconnus au passage, durent le rassurer, car il s’éloigna, murmurant pour lui et le groupe voisin :
— Frenchmen…
Frenchmen… On les regarda avec curiosité, ces hommes qui pouvaient avoir d’autres préoccupations que le débit, à l’heure, du puits Blue Diamond, les prospections au sud du Green Lake… Sarajevo, la Serbie, l’Autriche, les Vieux Pays !…
Comme je passais, le regard rivé malgré moi, sur ces visages pâlis d’une autre fièvre que celle du pétrole, j’entendis un mot : La guerre… Je dus faire un effort pour avancer de quelques pas…