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COMME JADIS…

navigation en prairie me dédommagent de ma peine.

Après les labours favorisés par un temps splendide, nous avons eu une journée de pluie, pluie fine, grise, calme, qui paraît devoir durer toujours ; pluie bienfaisante aussi, préparant la terre à l’action du disque et de la herse, la mettant en état de recevoir la semence.

Mourier disque ; je herse. Le soir, nous rentrons sans parler. Henriette a fait « le train ». L’eau tirée du puits depuis deux ou trois heures s’est attiédie dans l’abreuvoir, le râtelier déborde de foin bleu odorant, l’auge regorge d’avoine. Nos bêtes, les jambes lourdes, comme les nôtres, après avoir marché dans la terre molle, sont secouées d’un grand frisson dès qu’elles sont débarrassées de leurs harnais… Avant de se coucher, Mourier viendra jeter un dernier coup d’œil à l’étable, et je serai mise au courant des moindres faits qu’il aura remarqués. Si Maggy, Barney ou un autre cheval n’a pas fini son avoine, s’il boude devant son foin, dans la nuit j’entendrai la porte de la maison s’ouvrir et se refermer doucement : mon vieux Français inquiet se rendra à l’écurie…

Mais, puisque je vous initie aux travaux de la culture, sachez que nous n’avons pas attendu que le hersage fût fini pour commencer de semer le blé. La saison est si courte… En août, il faudra songer à moissonner. Aussi, faire du blé, ici, au Nord, dans « nos places » nouvelles, « geleuses »,