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profonds que pussent être ceux qui s’étaient longtemps occupés de physique atomistique, d’expériences et de machines, les Méditations de Descartes durent leur sembler trop obscures pour que leur esprit, peu dégagé des sens, pût approfondir cet ouvrage. Aussi était-ce un éloge que de dire d’un philosophe : « Il entend les Méditations de Descartes. » À cette époque, Vico voyait souvent le signer D. Paolo Doria, chez le signer Garavita, dont la maison était le rendez-vous des gens de lettres. Ce Doria, aussi distingué comme homme du monde que comme philosophe, était le seul avec lequel Vico pût parler métaphysique, et ce que Doria admirait dans Descartes de sublime, de grand, de nouveau, paraissait à Vico vieux et commun chez les platoniciens. Mais dans les raisonnements de Doria il apercevait un esprit qui brillait souvent de l’éclat divin de Platon, et, dès ce moment, ils furent unis par les liens d’une confiante et noble amitié.

Jusqu’alors Vico avait admiré sur tous les autres auteurs Platon et Tacite. Le second, doué d’une singulière pénétration métaphysique, contemple l’homme tel qu’il est ; le premier, tel qu’il doit être. Platon, avec son universalité scientifique, embrasse toutes les formes de la vertu qui composent l’idéal de la sagesse humaine. Tacite descend au détail de toutes les règles de l’utilité pratique, de sorte que l’homme honnête se puisse toujours diriger vers le bien, à travers toutes les chances du hasard et de la perversité humaine. Cette admiration, cette manière d’envisager ces deux grands auteurs était dans l’esprit de Vico comme l’idée première du plan sur lequel il devait composer une histoire idéale et éternelle, dont les phases servissent