Page:Michelet - Œuvres complètes Vico.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lui inspirèrent peu de goût pour la morale des stoïciens et des épicuriens, qui lui parut une morale de solitaire : les seconds, en effet, se renferment dans la molle oisiveté des jardins d’Épicure, et les premiers, tout entiers dans leurs théories, se proposent l’impossible. Yico s’occupa bientôt après de la physique d’Aristote, de celle d’Épicure, et enfin de celle de René Descartes. Cette étude lui fît goûter la physique de Timée, adoptée par Platon, et qui explique le monde par une combinaison numérique ; en même temps il se garda bien de mépriser la physique des stoïciens qui se compose de points ; ces deux systèmes ne diffèrent point en substance, comme il chercha plus tard à le prouver, dans son livre De antiquissima Italorum sapientia ; mais il ne put admettre ni comme hypothèse, ni comme système, la physique mécanique d’Épicure ni celle de Descartes, toutes deux essentiellement fausses.

Observant ensuite qu’Aristote et Platon appuyaient souvent de preuves mathématiques les assertions de la philosophie, il voulut étudier la géométrie, et alla jusqu’à la cinquième proposition d’Euclide. Mais Vico trouvait plus facile d’embrasser dans un même genre métaphysique l’ensemble des vérités particulières que de saisir partiellement toutes ces quantités géométriques. Il apprit ainsi à ses dépens que les intelligences élevées à l’universalité de la métaphysique réussissent difficilement dans une étude qui ne convient qu’aux esprits minutieux. Il cessa donc de s’y livrer, et chercha plutôt dans la lecture assidue des orateurs, des historiens et des poètes d’heureux rapprochements qui pussent lier entre eux les faits les plus éloignés. C’est là tout le secret de l’éloquence.