Cicéron et Boccace, Dante et Virgile, Horace et
Pétrarque, curieux de juger impartialement en quoi
ils diffèrent et de combien la langue latine l’emporte
sur l’italienne. Les meilleurs ouvrages étaient lus
aussi trois fois : la première pour en saisir l’unité,
la seconde pour en observer la liaison et la suite, la
troisième pour noter les idées noblement conçues et
les expressions remarquables ; ce qu’il faisait sur le
livre même, sans se créer un répertoire de lieux communs et de phraséologie. Il croyait qu’une telle
méthode facilitait l’emploi de ces formes, lorsqu’on se
les rappelait à propos, et que c’était l’unique moyen
de bien imaginer et de bien rendre.
Lisant ensuite dans l’Art poétique d’Horace que la philosophie morale ouvre à la poésie la source de richesse la plus abondante, il fit une étude sérieuse des anciens moralistes grecs, choisissant d’abord Aristote qu’il avait vu cité le plus souvent dans ses livres élémentaires de droit. Dans cette étude, il observa bientôt que la jurisprudence romaine n’est qu’un art d’enseigner l’équité par une foule de préceptes minutieux sur l’application du droit naturel, préceptes que les jurisconsultes tiraient des motifs de la loi et de l’intention du législateur ; mais la science du juste, enseignée par les moralistes, repose sur un petit nombre de vérités éternelles, expression métaphysique d’une justice idéale qui, dans les travaux de la cité dont elle est comme l’architecte, ordonne aux deux justices particulières (la commutative et la distributive) la dispensation de l’utile selon deux mesures invariables, l’arithmétique et la géométrique. Il comprit dès lors qu’on n’apprend dans les écoles que la moitié de la