sophiques ; c’est dire assez que, prises dans leur premier sens, elles ne peuvent assurer à Homère la gloire
d’avoir fondé la civilisation grecque. — Toutes ces
imperfections de la poésie homérique que l’on a tant
critiquées répondent à autant de caractères des peuples
grecs eux-mêmes. — 5. Nous assurons à Homère le
privilège d’avoir eu seul la puissance d’inventer les
mensonges poétiques (Aristote), les caractères héroïques
(Horace) ; le privilège d’une incomparable éloquence
dans ses comparaisons sauvages, dans ses affreux
tableaux de morts et de batailles, dans ses peintures
sublimes des passions, enfin le mérite du style le plus
brillant et le plus pittoresque. Toutes ces qualités
appartenaient à l’âge héroïque de la Grèce. C’est le
génie de cet âge qui fit d’Homère un poète incomparable. Dans un temps où la mémoire et l’imagination
étaient pleines de force, où la puissance d’invention
était si grande, il ne pouvait être philosophe. Aussi ni
la philosophie, ni la poétique ou la critique, qui vinrent
plus tard, n’ont pu jamais faire un poète qui approchât
seulement d’Homère. — 6. Grâce à notre découverte,
Homère est assuré désormais des trois titres immortels
qui lui ont été donnés, d’avoir été le fondateur de la civilisation grecque, le père de tous les autres poètes,
et la source des diverses philosophies de la Grèce. Aucun
de ces trois titres ne convenait à Homère tel qu’on
se l’était figuré jusqu’ici. Il ne pouvait être regardé
comme le fondateur de la civilisation grecque, puisque
dès l’époque de Deucalion et Pyrrha elle avait été
fondée avec l’institution des mariages, ainsi que nous
l’avons démontré en traitant de la sagesse poétique qui
fut le principe de cette civilisation. Il ne pouvait être
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