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de l’ordre et de la sécurité fonde les monarchies. Voilà la loi royale (pour parler comme les jurisconsultes) par laquelle Tacite légitime la monarchie romaine sous Auguste : Qui cuncta discordiis fessa sub imperium unius accepit.

Fondées sur la protection des faibles, les monarchies doivent être gouvernées d’une manière populaire. Le prince établit l’égalité, au moins dans l’obéissance ; il humilie les grands, et leur abaissement est déjà une liberté pour les petits. Revêtu d’un pouvoir sans bornes, il consulte non la loi, mais l’équité naturelle. Aussi la monarchie est-elle le gouvernement le plus conforme à la nature, dans les temps de la civilisation la plus avancée.

Les monarques se glorifient du titre de cléments, et rendent les peines moins sévères ; ils diminuent cette terrible puissance paternelle des premiers âges. La bienveillance de la loi descend jusqu’aux esclaves ; les ennemis même sont mieux traités, les vaincus conservent des droits. Le droit de citoyen, dont les républiques étaient si avares, est prodigué ; et le pieux Antonin veut, selon le mot d’Alexandre, que le monde soit une seule cité.

Voilà toute la vie politique et civile des nations, tant qu’elles conservent leur indépendance. Elles passent successivement sous trois gouvernements. La législation divine fonde la monarchie domestique, et commence l’humanité ; la législation héroïque ou aristocratique forme la cité, et limite les abus de la force ; la législation populaire consacre dans la société l’égalité naturelle ; la monarchie enfin doit arrêter l’anarchie, et la corruption publique qui l’a produite.