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chez les Grecs et les Latins, nom et nature signifièrent souvent la même chose.

2. La topique commença avec la critique. La topique est l’art qui conduit l’esprit dans sa première opération, qui lui enseigne les aspects divers (les lieux, topoi) que nous devons épuiser, en les observant successivement, pour connaître dans son entier l’objet que nous examinons. Les fondateurs de la civilisation humaine se livrèrent à une topique sensible, dans laquelle ils unissaient les propriétés, les qualités ou rapports des individus ou des espèces, et les employaient tout concrets à former leur genres poétiques ; de sorte qu’on peut dire avec vérité que le premier âge du monde s’occupa de la première opération de l’esprit.

Ce fut dans l’intérêt du genre humain que la Providence fit naître la topique avant la critique. Il est naturel de connaître d’abord les choses, et ensuite de les juger. La topique rend les esprits inventifs, comme la critique les rend exacts. Or, dans les premiers temps les hommes avaient à trouver, à inventer toutes les choses nécessaires à la vie. En effet, quiconque y réfléchira, trouvera que les choses utiles ou nécessaires à la vie, et même celles qui ne sont que de commodité, d’agrément ou de luxe, avaient déjà été trouvées par les Grecs, avant qu’il y eût parmi eux des philosophes. Nous l’avons dit dans un axiome : Les enfants sont grands imitateurs ; la poésie n’est qu’imitation ; les arts ne sont que des imitations de la nature, qu’une poésie réelle. Ainsi, les premiers peuples qui nous représentent l’enfance du genre humain, fondèrent d’abord le monde des arts ; les philosophes qui vinrent long-