harmonie avec les réalités, et peu à peu les noms de héros, de poète, qui d’abord désignaient tel individu, comprirent tous les caractères de perfection qui pouvaient entrer dans le type idéal de l’héroïsme, de la poésie. Le vrai poétique, résultat de cette double opération, fut plus vrai que le vrai réel ; quel héros de l’histoire remplira le caractère héroïque aussi bien que l’Achille de l’Iliade ?
Cette tendance des hommes à placer des types idéaux sous des noms propres, a rempli de difficultés et de contradictions apparentes les commencements de l’histoire. Ces types ont été pris pour des individus. Ainsi toutes les découvertes des anciens Égyptiens appartiennent à un Hermès ; la première constitution de Rome, même dans cette partie morale qui semble le produit des habitudes, sort tout armée de la tête de Romulus ; tous les exploits, tous les travaux de la Grèce héroïque composent la vie d’Hercule ; Homère enfin nous apparaît seul sur le passage des temps héroïques à ceux de l’histoire, comme le représentant d’une civilisation tout entière. Par un privilège admirable, ces hommes prodigieux ne sont pas lentement enfantés par le temps et par les circonstances ; ils naissent d’eux-mêmes, et ils semblent créer leur siècle et leur patrie. Comment s’étonner que l’antiquité en ait fait des dieux ?
Considérez les noms d’Hermès, de Romulus, d’Hercule et d’Homère comme les expressions de tel caractère national à telle époque, comme désignant les types de l’esprit inventif chez les Égyptiens, de la société romaine dans son origine, de l’héroïsme grec, de la poésie populaire des premiers âges chez la même