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celui des dieux, est caractérisé par Hercule, Orphée et le second Hermès. L’Occident a ses Hercules, l’Orient ses Zoroastres qui présentent le même caractère. Autant de types idéaux des fondateurs des sociétés, et des poètes théologiens. Si l’on s’obstine à ne voir que des hommes dans ces êtres allégoriques, que de difficultés se présentent[1] !
- ↑ Orphée surtout, si on le considère comme un individu, offre aux yeux
de la critique l’assemblage de mille monstres bizarres. — D’abord il vient de
Thrace, pays plus connu comme la patrie de Mars que comme le berceau de
la civilisation. — Ce Thrace sait si bien le grec qu’il compose en cette langue
des vers d’une poésie admirable. — Il ne trouve encore que des bêtes farouches
dans ces Grecs, auxquels tant de siècles auparavant Deucalion a enseigné la
piété envers les dieux, dont Hellen a formé une même nation en leur donnant
une langue commune, chez lesquels enfin règne depuis trois cents ans la maison d’Inachus. — Orphée trouve la Grèce sauvage, et en quelques années elle
fait assez de progrès pour qu’il puisse suivre Jason à la conquête de la Toison
d’or ; la marine n’est point un des premiers arts dont s’occupent les peuples.
— Dans cette expédition il a pour compagnons Castor et Pollux, frères d’Hélène,
dont l’enlèvement causa la fameuse guerre de Troie. Ainsi, la vie d’un seul
homme nous présente plus de faits qu’il ne s’en passerait en mille années !…
Ce sont peut-être de semblables observations qui ont fait conjecturer à Cicéron,
dans son livre sur la Nature des Dieux, qu’Orphée n’a jamais existé. Elles
s’appliquent pour la plupart avec la même force à Hercule, à Hermès et à
Zoroastre.
À ces difficultés chronologiques joignez-en d’autres, morales ou politiques. Orphée, voulant améliorer les mœurs de la Grèce, lui propose l’exemple d’un Jupiter adultère, d’une Junon implacable qui persécute la vertu dans la personne d’Hercule, d’un Saturne qui dévore ses enfants ! et c’est par ces fables capables de corrompre et d’abrutir le peuple le plus civilisé, le plus vertueux, qu’Orphée élève les hommes encore bruts à l’humanité et à la civilisation.
Guidés par les principes de la science nouvelle, nous éviterons ces terribles écueils de la mythologie ; nous verrons que ces fables, détournées de leur sens par la corruption des hommes, ne signifiaient dans l’origine rien que de vrai, rien qui ne fût digne des fondateurs des sociétés. La découverte des caractères poétiques, des types idéaux, que nous venons d’exposer, fera luire un jour pur et serein à travers ces nuages sombres dont s’était voilée la chronologie.