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dont elle naît, avec les effets qu’elle produit, avec les résultats de ses opérations, avec ce qui lui est semblable ou dissemblable ou contraire, avec ce qui est plus grand ou plus petit ou qui lui est égal. Aussi les catégories d’Aristote et les topiques sont entièrement inutiles. Si on y veut trouver du nouveau, on deviendra un lulliste ou un kirkérien, un homme qui connaît les lettres, mais qui ne sait point épeler pour lire dans le grand livre de la nature. Mais si on les considère comme des index, des tables de ce qu’il faut examiner sur un sujet pour en avoir une vue claire, rien de plus fécond pour l’invention ; et c’est une source d’où peuvent sortir la faconde oratoire et l’observation profonde. Réciproquement si l’on se fie pour voir les choses à l’idée claire et distincte, on sera facilement trompé, et l’on croira souvent connaître distinctement ce dont on n’aura qu’une notion confuse, parce qu’on n’aura pas connu tout ce qui est dans l’objet et qui le distingue des autres choses. Mais si l’on parcourt avec le flambeau de la critique tous les lieux de la topique, alors on sera sûr de connaître l’objet d’une manière claire et distincte ; parce qu’on l’aura soumis à toutes les questions que l’on peut élever sur l’objet proposé, et dans cet examen successif la topique même est critique. En effet les arts sont en quelque sorte les lois de la cité de l’intelligence (reipublicae litterariæ). Ce sont les observations des savants sur la nature, qui se sont converties en règles de méthode. Celui qui fait une chose selon l’art, celui-là est sûr d’avoir pour lui le sentiment de tous les doctes ; celui qui opère sans art se trompe, parce qu’il ne se fie qu’à sa nature personnelle.