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vie pratique, tout cela est sorti des genres, parce que des genres dérivent les équivoques qui sont, comme on dit, ab errore. En physique, ce sont les noms génériques de matière et de forme ; en jurisprudence, le mot juste, avec sa largeur et son extension indéfinie ; en médecine, les termes le sain et le corrompu, dont le sens a trop d’extension ; dans la vie pratique, le mot utile, qui n’est pas défini. C’était aussi le sentiment des anciens philosophes de l’Italie ; on en retrouve la trace dans la langue latine : certum a deux sens, ce qui est prouvé et indubitable, et celui de propre, qui s’oppose à commun, de manière à faire entendre que le particulier est certain, et le général douteux. Pour eux vérité et équité, verum et æquum, étaient synonymes. En effet l’équité se fait voir dans les circonstances spéciales du fait, comme la justice dans le genre même ; d’où l’on voit que ce qui est exclusivement général est faux, et que le vrai c’est la dernière, la plus spécifique détermination des choses.

Les genres comme dénominations sont infinis ; or l’homme n’est ni rien ni tout ; il ne peut donc penser au néant que par négation du réel, et à l’infini que par négation du fini. Mais, dira-t-on, tout triangle a la somme de ses angles égale à deux angles droits ; n’est-ce pas là une vérité infinie ? Sans doute, mais elle ne l’est pas pour moi ; si elle l’est, c’est en ce sens que j’ai dans l’esprit la forme d’un triangle auquel je reconnais cette propriété, et que cette forme me sert d’archétype pour toutes les autres. Que si l’on prétend que c’est là un genre infini, parce qu’à cet archétype de triangle se peuvent assimiler un nombre indéfini de triangles, je le veux bien, je leur abandonnerai volon-