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seuls patriciens. Ils réunissaient la connaissance du droit et l’art de l’approprier, de l’appliquer à chaque cause, et le jurisconsulte romain était tout à la fois le philosophe, le légiste et l’orateur des Grecs.

Sous la république, peu de temps avant la première guerre punique, Tiberius Coruncanius commença à enseigner aux jeunes patriciens l’art d’interpréter le droit, et, avec le temps, la jurisprudence devint une science propre aux Romains. Étrangère à l’ambition oratoire, aux séductions de l’éloquence, non moins grave que la philosophie, elle s’attachait à appliquer avec précision les règles de droit aux intérêts particuliers. Aussi, les jurisconsultes furent appelés les sages de Rome (Pomponius, Hist. du Droit), et la jurisprudence est définie, dans Ulpien, par le mot sagesse. Mais alors la sagesse est prise dans un sens tout différent de celui qu’entendaient les Grecs : elle renferme les choses divines, c’est-à-dire les rites, les cérémonies religieuses, particulièrement la divination, et les choses humaines, c’est-à-dire toutes les choses profanes, soit publiques, soit privées ; en sorte que la jurisprudence est, chez les Romains, la connaissance de tout le droit établi, divin et humain ; de plus, la science du juste et de l’injuste, dans ce sens que le jurisconsulte sait appliquer le droit aux causes particulières.

Les jurisconsultes se sont encore approprié la science des étymologies, l’étude de la propriété des termes ; c’est là le véritable flambeau du droit fondé sur l’autorité… Cette étude, chez les Grecs, dépendait de la philosophie, et était guidée par la raison plutôt que par l’autorité. Platon, dans son Cratyle, traite des