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on ne se donnait la peine de copier que les ouvrages excellents.

Pourquoi les anciens qui avaient, dans leurs gymnases, dans leurs thermes, dans leur champ de Mars, des espèces d’universités pour l’éducation du corps, n’en ont-ils pas aussi pour celle de l’âme ? C’est que chez les Grecs un philosophe était à lui seul une université complète. Les Romains avaient encore moins besoin d’université, eux qui plaçaient la sagesse dans la seule jurisprudence, et qui apprenaient cette science dans la pratique des affaires publiques. Mais lorsque l’empire succéda à la république, et que la jurisprudence, dévoilant ses mystères, s’étendit et se compliqua par la multitude des écrivains, par la division des sectes, par la variété des opinions, on fonda des académies où elle était enseignée à Rome, à Béryte, à Constantinople. Combien n’avons-nous pas plus besoin encore des universités ?… Dans les nôtres, chaque professeur enseigne la science dans laquelle il est le plus versé. Mais cet avantage entraine avec lui un inconvénient : c’est la division, la scission des arts et des sciences, que la seule philosophie embrassait toutes autrefois, et qu’elle animait d’un même esprit. Les anciens philosophes présentaient une harmonie parfaite entre leurs mœurs, leur doctrine et leur manière de l’exposer. Socrate qui professait ne rien savoir, n’avançait rien lui-même, mais pressait les sophistes par une suite de questions, comme s’il eût voulu apprendre d’eux quelque chose ; et c’était de leurs réponses qu’il tirait ses inductions. Les Stoïciens, qui faisaient de l’intelligence la règle du vrai, et prétendaient que le sage ne pense rien à la légère (nihil