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L’ESCOLE DES FILLES.


quel plaisir que c’est, quand un corps nud se vautre sur un autre et que les bras, les jambes, les cuisses sont entrelacés les uns parmy les autres d’une douce estrainte, à la façon des anguilles, tu ne voudrois jamais faire autre chose. Pour les regards amoureux, il n’y a rien si plaisant à considérer qu’un beau corps en la personne aymée, la structure de ses membres, ses postures et ses dispositions lascives ; il n’y a rien qui excite davantage au plaisir, autant à voir qu’à estre veu ; toutes les passions s’expriment par là, et l’âme se donne entièrement à connoistre en furetant les lieux qui luy sont plus plaisants à voir. A ceste heure, la joye est si grande de regarder aux yeux de la personne aymée et de luy faire cependant quelque lasciveté au corps, dont elle soit honteuse ou esmue de quelque autre passion, qu’il n’y a langue humaine qui le puisse dignement exprimer. Quelle joye aussi de se montrer nud aux yeux de ce qu’on ayme, et de plus, luy causer ainsi d’abord de l’estonnement et de la confusion par un spectacle qui ne luy doit donner par après que du ravissement. La jouissance vient ensuite dans son rang, comme la dernière, et elle doibt donner lieu et temps que ces premières se soyent passées auparavant, car après elle les autres n’ont presque plus de goust ny de pointe, et

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