Page:Michel Millot - L’Escole des filles, 1790-1800.djvu/65

Cette page a été validée par deux contributeurs.
55
L’ESCOLE DES FILLES.


j’estois d’elles, et que je visse que je ne pusse oster cette croyance du monde, je voudrois du moins la rendre véritable en effect et prendre un plaisir qui ne me cousteroit rien et dont il ne me sçauroit arriver pire, outre que j’empescherois que tant de monde, par un faux et mauvais jugement, fussent damnés, car il n’y a que l’opinion qui fait le mal.

Fanchon. Vrayement, c’est bien raisonné, et faire toujours le bien contre le mal. Et cela estant, si j’estois une fille comme vous dites, je n’en ferois pas moins pour esteindre la mesdisance, mais le meilleur à tout cela, comme vous avez desjà dit, c’est de se comporter si bien que l’on vienne à n’en sçavoir rien.

(35) Susanne. Dame ouy, et cela n’est point mal aysé quand on a un amy qui est discret et qui ne se vante de rien, et quand tu auras un peu accoutumée cette vie, tu auras un plaisir non pareil. Quant au reste des filles, tu en verras cent à l’église, dans les rues, dans les compagnies, qui passeront pour honestes, desquelles tu te mocqueras impunément, d’autant qu’elles n’auront garde de s’aller imaginer cela de toy. Tu passeras devant elles, selon ta condition, ne parlant que de choses bonnes et honestes ; tu seras louée et estimée de chacun, car la connoissance intérieure de ce que tu auras expéri-