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L’ESCOLE DES FILLES.

Susanne. Le mary et la femme, cela est bon, vois-tu, mais il n’est pas encore si bon que les autres, à cause qu’il est plus ordinaire et que c’est leur pain quotidien ; car c’est la difficulté et la rareté qui rend cela un petit meilleur, d’où vient que les femmes, pour prévenir à tout, quand elles sont mariées elles ont toujours des messieurs qui le leur font en cachette, à cause que le mary ne le veut pas et qu’il en seroit jaloux s’il le sçavoit.

Fanchon. Et pourquoy ne le veut-il pas ?

Susanne. C’est un autre fait, et nous le dirons tantost pourquoy, mais le mary va bien chercher aussi ailleurs quand il est dégousté de sa femme, et tesmoin ton père qui a donné le plaisir à Marguerite, la servante que vous avez chassée. C’est pour cela que vous eustes tant de bruict dernièrement au logis. Hé bien ! ta mère, qui est encore belle et qui sçait cela, penses-tu qu’elle n’ait pas quelques messieurs, en secret, qui lui viennent faire ?

Fanchon. Je ne sçais pas, ma cousine, mais les messieurs et dames, qu’est-ce ?

Susanne. Celui-là est bien-plus plaisant que les autres. Les messieurs, ce sont des personnes bien faites, mariez ou d’âge pour l’estre, qui cherchent à donner le plaisir aux femmes, et Paris en est tout plein ; et les dames sont les