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L’ESCOLE DES FILLES.


que je voudrois pouvoir quelque chose pour son soulagement.

Susanne. Ah ! je commence à cette heure à comprendre votre mal à tous deux. Mais quand il dit qu’il t’aime, ne luy dis-tu point que tu l’aimes aussi ?

Fanchon. Non, ma cousine, car à quoy cela serviroit-il ? Si je croiois que cela fust bon à quelque chose, je le luy dirois, mais comme il n’est bon à rien, je ne me sçaurois contraindre à luy dire.

Susanne. Voilà qui t’a trompée, pauvre fille, car si tu luy avois dit que tu l’aimes, il t’auroit infailliblement monstré le plaisir que je te veux apprendre, mais il n’a eu garde jusques icy, puisqu’il luy estoit impossible à moins que tu ne l’aimasses.

Fanchon. Certes, vous me dites là une chose estrange, ma cousine, que pour aimer un homme de la sorte, on doit avoir tant de plaisir ; car il me semble que quand j’aimerois Robinet et cent mille autres avec luy, je n’y en aurois pas davantage qu’en ne les aimant point.

Susanne. Cela seroit bon à dire, grosse sotte, si on estoit toujours à se regarder, mais que penses-tu ? dame, on se touche quelquefois.

Fanchon. Mais je l’ay aussi touché plusieurs