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L’ESCOLE DES FILLES.


estoient venus, et voilà bien de quoy me contenter ; pour moy je suis lasse de tant de façons.

Susanne. Mais ne te disent-ils pas quelquefois que tu es belle, et ne te veulent-ils pas baiser ou toucher en quelque endroit ?

Fanchon. Ho ! ouy bien pour cela, ma cousine ; mais Dieu ! qui est-ce qui vous l’a donc dit ? Je pense que vous devinez ou que vous estiez derrière eux quand ils me parloient, car je vous asseure que c’est la plus grande partie de ce qu’ils me content, de dire que je suis belle, et quelquefois ils approchent leur bouche de la mienne pour me baiser et me veulent mettre les mains sur les tétons ; ils disent bien qu’ils prennent plaisir à toucher cela, mais pour moy je dis que je n’y en prends pas.

Susanne. Et les laisses-tu faire quand ils veulent faire ces actions-là ?

(3) Fanchon. Vrayement nenny, car ma mère m’a dit que ce n’estoit pas bien fait de souffrir ces choses-là.

Susanne. Hé ! que tu es innocente quand je t’écoute parler, et que tu es encore ignorante en tout ce que tu dis.

Fanchon. Et qu’est-ce donc à dire cela, ma cousine ? et y a-t-il quelque chose à sçavoir que je ne sçache point ?

Susanne. Il y a tout, et tu ne sais rien.