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LE COMBAT DU VIT ET DU CON.


Descouvre un peu le grouin, sans beaucoup s’esmouvoir ;
Tastonnant de la teste, il s’efforce de veoir
L’ennemy qui se vante ainsi de le soubmettre.
— Voyons, dit-il, un peu si nous pouvons cognoistre
Qui vous êtes, qui tant d’injures me donnez.
Et comme il s’avançoit, le con lui crache au nez.
A ce sensible affront la fureur le surmonte,
De colère le sang au visage luy monte ;
Il rengaigne pourtant, et faict reflexion
De quelle sorte il doibt porter ceste action,
Et son muffle bouffy, vomissant la fumée,
Faict bien veoir que son ame estoit tout allumée :
Il s’enfle, il se roidit, il devient enflammé,
Et d’un vent de fureur il devient animé ;
Resous de se bien battre et rompre toute trefve,
Par eslans redoublez son eschine s’eslève.
Cerchant son adversaire en lion rugissant,
Il le trouve, il l’attaque, et par un pas glissant,
En allongeant son coup, il s’engage à la passe,
Engaignant brusquement le con qui le menace.
Tout ravy d’avoir joint ce superbe ennemy,
Il est bien resolu de n’en faire à demy ;
Voulant vaincre ou mourir, il vous pousse et repousse
Sa lame dans la playe, avec mainte secousse,
Tel qu’un sanglant boucher qui pousse son couteau
Par des coups redoublés dans le col d’un agneau.
Il coigne, il se demeine et de cul et de teste,
Il s’employe au combat, plus fier qu’une tempeste

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