Page:Michel Millot - L’Escole des filles, 1790-1800.djvu/191

Cette page a été validée par deux contributeurs.
181
L’ESCOLE DES FILLES


pour les entretenir, à cause que leur maison est desjà toute faicte, et pourtant on gouste le plaisir d’une part et d’autre avec moins d’embarras, et ils y prennent bien de plus grandes douceurs que s’ils avoyent quelque chose à craindre.

(95) Fanchon. Tellement doncques que je n’ay plus qu’à songer de me marier vistement pour bien passer mon temps et me mettre en l’estat de n’avoir plus rien à apprehender.

Susanne. Dame ouy, quand tu seras ainsi pourveuë, tu pourras alors, aux heures de loisir, quand ton mary n’y sera pas, te divertir agréablement avec un autre et passer quelquefois de bonnes nuicts ensemble. A ceste heure, tu n’en aymeras pas moins ton mary pour ce petit plaisir que tu luy desroberas, tant s’en faut, car s’il falloit le préférer à ton ami, tu le ferois asseurement ; mais tu gousteras seulement des embrassemens tantost de l’un tantost de l’autre, et ce changement de vit te plaira pour le moins autant que si tu ne mangeois tous les jours que d’une sorte de viande.

(96) Fanchon. Ma cousine, si je vous disois qu’il y a desjà quelqu’un qui m’en conte depuis que j’ay gousté vos instructions et que ces gentillesses d’amour m’ont un peu poly l’esprit, me croiriez-vous ?

Susanne. Est-ce pour le mariage ?

16