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L’ESCOLE DES FILLES


j’ay dit, et celle de l’homme en mesme temps, s’entrerencontrant par un mouvement chaleureux et un peu contraire, et qui la chatouillent, au fond de la nature, toutes deux ensemble, là où l’homme ne reçoit point de plaisir de celle de la femme, qui ne coule pas en luy. Mais si on regarde qu’une partie du plaisir consiste dans la chaleur et dans le tremoussement que l’on a, et que celuy qui agit, s’il se plaist davantage dans son action que celuy qui ne bouge, à proportionnée raison ayme celuy sur lequel il s’agite, on ne pourra résoudre en ce cas lequel des deux est plus content et satisfaict.

(69) Fanchon. Et pourquoy est-ce, ma cousine, que le plaisir arrive de la sorte, et que tous deux, naturellement et sans sçavoir qu’il y en ayt, souhaictent tant de se joindre ?

Susanne. C’est qu’autrefois, remarque bien cecy, l’homme et la femme n’estoient qu’un, et ils estoient conjoints ensemble par ces deux membres qui estoient enclos l’un dans l’autre, en sorte que l’homme ne mouroit point et se reproduisoit continuellement en sa partie qui estoit sa femme et qu’il empeschoit de mourir. Et du depuis qu’ils ont esté séparés l’un de l’autre, la nature, qui se resouvient de sa désunion, veut tousjours retourner à soy-mesme, pour avoir l’ancienne conjonction, et s’efforce,