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Fontainebleau, 13 septembre 1916.

Il existe déjà une classe d’enrichis de la guerre. On les appelle les nouveaux riches, ou on les désigne par leurs initiales, les N. R. Et ce ne sont pas seulement ceux qui, profitant de la nécessité d’armer, de nourrir, d’équiper, de vêtir, de soigner des millions de mobilisés, participent de près ou de loin aux généreux marchés de la guerre. Ce sont aussi tous ces marchands en gros, qui spéculent férocement sur la cherté de la vie, la hausse des denrées, la difficulté des transports. Et tous ceux à qui la catastrophe apporte incidemment la fortune, tels les commerçants de l’arrière-front qui vivent du soldat, ou ces magasins de deuil à qui les mille morts par jour de la guerre valent un surcroît de clientèle, ou ces photographes qui placent dans toutes les chaumières le portrait agrandi du fils tué…

Et tous ces nouveaux riches sont accueillis sans rigueur. On ne s’indigne pas de ces prospérités sorties du malheur public. On en sourit, gentiment. J’ai sous les yeux une aimable