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fait une petite fortune en louant cent francs par nuit, à des hôtes de passage, les chambres destinées à ses clientes éventuelles. À Saint-Enogat, un de nos ministres a dû coucher dans une cave. Et toute la banlieue, par ces dimanches d’été, n’est qu’une kermesse : trains pris d’assaut, terrasses de café répandues jusque sur la chaussée, innombrables phalanges de petites cyclistes en robe blanche… Et penser qu’à vingt lieues de là on ne cesse pas de se battre. Ah ! Nos petits-enfants s’imagineront difficilement la vie pendant la grande guerre…

Mon mari est très fier de se promener aux côtés de son fils en uniforme. Il s’intéresse à l’équipement, aux effets de fantaisie. Pour lui, nul drap n’est trop fin, nul bottier trop cher. Ils ont ensemble de ces conversations à voix chaude comme en ont entre elles les femmes qui parlent toilette. Car René aussi est radieux sous son costume. Non seulement parce qu’il attache à cette tenue des idées de gloire et d’héroïsme, parce qu’elle accroît son importance et son prestige, mais aussi parce qu’elle flatte en lui une coquetterie presque féminine. Ah ! L’attrait complexe de l’uniforme… Comme il a servi ceux qui voulaient la guerre…

Pierre est gai. Il nous rapporte une moisson