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de New-York. À table, on s’entretient des héros de ces aventures comme de vieilles connaissances.

De grands hôtels des Champs-Élysées, transformés d’abord en hôpitaux, ont rouvert. Autour du thé de cinq heures, s’assemble une foule animée, pépiante, dans une atmosphère qui sent encore un peu le phénol.

Les restaurants, des plus humbles aux plus fastueux, présentent un stupéfiant spectacle de tranquille abondance, de grasse chère, de goinfrerie à ventre déboutonné.

D’ailleurs, en ce printemps 1916, nul signe extérieur de souffrance. Observe-t-on la rue ? Interroge-t-on les petits commerçants, les domestiques, tous ceux qui touchent aux classes les plus sacrifiées ? Partout on recueille la même impression de résignation à peine plaintive. Il y a sûrement de nombreuses misères cachées. Mais elles sont isolées et timides, sans lien et sans voix. Et puis, les allocations doivent apaiser bien des impatiences, bien des révoltes. Pour que la guerre soit agréable à ce peuple, on dépense des milliards, qui retomberont un jour à sa charge.