Page:Michel Corday - Les Hauts Fourneaux, 1922.djvu/143

Cette page a été validée par deux contributeurs.

dans le premier enthousiasme, d’ajouter, à la nouvelle du succès, la pieuse action de grâces du général.

10 novembre 1915.

« Taisez-vous, méfiez-vous : les oreilles ennemies vous écoutent. » Ainsi l’ordonne une affiche répandue en tous lieux, et jusque dans les plus inviolables retraites. C’est le dernier acte du précédent cabinet. Il est daté du 28 octobre 1915. Ah ! Cet ordre impératif de défiance et de mutisme, quel symbole du temps où nous vivons !… Tenir pour suspects son voisin, ses proches, le monde entier… Se taire, s’imposer le bâillon, perdre jusqu’au privilège de la parole, se ravaler au rang du végétal… Et quelle stupeur de penser que, malgré les inquisitions, les expulsions, les concentrations, les exécutions, tant d’oreilles ennemies nous écoutent encore…

Cela me rappelle cette pancarte que certains commerçants arborent dans leurs boutiques : « Entrée interdite aux Allemands ». Il y en a donc encore, à Paris ?