Page:Michel Corday - Les Hauts Fourneaux, 1922.djvu/123

Cette page a été validée par deux contributeurs.

les gaz ou mourir de la gangrène gazeuse, cela me paraît également atroce. J’abomine le blocus, qui tue par la faim, autant que le raid aérien, qui tue par la bombe : je ne fais pas de différence entre des ventres crevés et des ventres affamés. Je n’ai jamais compris ces subtils distinguo entre les diverses manières de tuer. L’horrible, c’est de tuer. Je ne déplore pas particulièrement telle façon de faire la guerre : je déplore qu’on puisse encore faire la guerre.

C’est sur la guerre en soi qu’il faudrait concentrer toutes les indignations. C’est elle qui déchaîne tous les instincts de sauvagerie, de rapine et de destruction. N’est-ce pas la guerre qui engendre le pillage ? Une troupe en campagne saccage et maraude où qu’elle soit, dès qu’elle peut. Toute zone de bataille est razziée par l’un ou l’autre camp, et souvent par les deux. Toute maison abandonnée est une maison vidée. Les soldats l’avouent. Et maints propriétaires le constatent… Et quand je relis que le Palatinat fut incendié sur l’ordre de Louvois afin de faire le désert devant l’ennemi, que « pendant près de trois mois, les villes, les villages, les vignes et les vergers furent brûlés et rebrûlés, parmi les massacres, les viols, les cruautés d’une soldatesque enflammée par l’ivresse et par des