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manuels d’histoire, les grands événements sont les guerres, et les grands héros sont les conquérants. Dans la ville, partout des noms de rues célèbrent des victoires, partout des dômes, des colonnes, des arcs de triomphe sont dressés à la gloire des massacres. Dans les premiers livres dont il s’est recréé, figure toujours un anglais ridicule ou un traître allemand, selon que l’ennemi héréditaire est à l’ouest ou à l’est. Car il change. Dans leurs discours officiels, dans leurs enseignements, dans leurs moindres propos, tous ceux qui l’ont instruit et guidé lui ont appris, non pas à aimer son pays pour lui-même, mais à l’aimer contre les autres, d’un amour orgueilleux et jaloux, avide de suprématie totale, plein de raillerie, de dédain ou d’hostilité à l’endroit des voisins. Même le sport qu’il pratique, si salutaire, si salubre en soi, a été dévié de son but, est devenu pour lui une école de violence et de chauvinisme : les premiers avions, survolant les frontières, lui ont été représentés, non pas comme les messagers de la paix, mais comme les engins possibles d’une victoire. Et les premiers journaux qu’il ait lus, les premières pièces qu’il ait vues, exploitant les mêmes instincts, perpétuant les mêmes malentendus, les mêmes erreurs, n’ont