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22 juillet 1915.

On dirait que Paron m’évite. Il décline des invitations. Il raréfie ses visites. Quand, lui avouant ma propre indécision, je lui demande s’il est arrivé à se forger une opinion sur la genèse de la guerre, il se dérobe, sans parvenir à cacher son malaise. Pourquoi ?

Enfin, j’avais obtenu qu’il vînt aujourd’hui, car nous partons demain pour Ganville. Je ne l’avais pas revu depuis que j’avais précisé pour moi-même mes alarmes de l’attitude de René. Elles grandissaient encore, depuis que la guerre semble se prolonger indéfiniment, que les journaux préparent les esprits à une deuxième campagne d’hiver. Je les lui avouai. Il me répondit d’un ton d’amertume irritée que je ne lui connaissais pas.

— Vous vous étonnez que votre fils aime la guerre ? Il a dix-sept ans. Voilà dix ans qu’il comprend, qu’il voit, qu’il écoute. Qu’a-t-il appris ? Tout de suite, le prestige et la vénération des emblèmes militaires, la noblesse et l’éclat sans égal du métier des armes. Dans ses