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après leur argent et veulent éviter la défaite de leurs créanciers. Enfin, ils auraient réfléchi que, grands fournisseurs de guerre, ils n’auraient pas de plus sûr ni de meilleur client que leur propre pays : ils auraient découvert l’Amérique.

Comment choisir parmi tous ces mobiles ? Mais mon vieil ami Paron, qui m’a d’ailleurs ralliée à son opinion, reste plus convaincu que jamais que les industriels et les financiers sont, dans chaque pays, les grands artisans de la guerre moderne. Et il en voit, dans le concours américain, une preuve nouvelle.

— Sans doute, toutes ces raisons ont-elles joué. Mais comme ont-elles joué ? Voilà l’intéressant. Oui, le peuple américain s’est souvenu de La Fayette ; oui, il a vibré au récit des exploits, il a frémi des atrocités. Mais qui donc attisa ces sentiments généreux, qui donc a soufflé dessus jusqu’à ce qu’ils aient pris feu ? Qui donc a, par la voix formidable de la presse, exalté l’opinion jusqu’à ce qu’elle s’imposât au pouvoir ? Qui ? Sinon ceux que lésait la guerre sous-marine, ceux qui appréhendaient également la faillite possible des alliés et l’hégémonie commerciale étrangère, bref tous ceux qui, leur pays jeté dans la guerre, verraient à la fois leurs craintes s’apaiser et leurs affaires s’accroître ?