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15 février 1917.

L’offensive… Pour moi ce mot ne représente plus qu’un surcroît de risque et d’alarmes, un massacre intense et vain où périssent, en une matinée, plus de victimes qu’en un mois de guerre. Et combien de mères doivent penser comme moi, sans oser l’avouer ?

Ce soir, après dîner, entre hommes politiques, industriels, militaires, tous de haute volée, ils discutaient la date de la prochaine hécatombe.

J’écoutais, oppressée, rétrécie, plus anxieuse que si mon propre sort eût été en jeu : il s’agissait peut-être de celui de René.

Il paraît qu’on n’est pas d’accord sur cette date, dans le haut commandement. Les uns sont impatients de courir la chance, les autres voudraient temporiser. Sur ce point, les gens au pouvoir sont également divisés. Et là, dans ce salon, ces deux mêmes courants se dessinaient. On entendait : « Les Anglais ne veulent pas attendre. Ils ont raison. Les militaires sont faits pour se battre. Il faut un vainqueur et un vaincu.