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lée, alarmée, exaltée par ses maîtres secrets… Chaque peuple épousant leurs querelles de marchands, travesties en querelles de race… Enfin toutes les nations s’inspirant, au spectacle même de leur frénésie, une mutuelle terreur, et se précipitant les unes sur les autres.

« Je le vois encore, mon pauvre petit, les bras écartés, les mains tombantes, ses mains trop longues pour sa taille inachevée :

« — Mais, maman… Si tout cela était vrai… Si tous ceux qui sont morts s’étaient fait tuer pour cela… Ce serait une raison de plus pour que je parte, moi… le fils d’un de ces hommes… »

Il part. D’abord à Rennes, au dépôt. Puis à Fontainebleau, en stage. Enfin, le 12 décembre 1916, — la veille même du jour où son fils doit rejoindre les armées, — elle dîne chez le plus haut seigneur du fer, l’homme mystérieux et tout-puissant, celui, dit-elle, « qui peut tout et dont on ne sait rien. » Il traite ce soir-là ses grands vassaux, toute la noblesse du métal. Vers dix heures, ces hommes sortent du fumoir, en masse et en tumulte. Un coup de téléphone vient de leur apprendre que l’Allemagne propose la paix. On a connu la note adressée aux Neutres à deux heures de l’après-midi. On se résout enfin à publier la nouvelle. Les journa-