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on cite déjà des villes où pourrait se transférer le gouvernement : Tours, Nantes, Rennes, Bourges, Clermont-Ferrand.

Tandis que se poursuivent ces préparatifs discrets, la presse étale sa jactance. Elle accueille la reprise des divers bombardements sur ce ton de fanfaronnade qui s’accorde si peu avec la gravité de l’heure et la pensée des victimes tombées sous les bombes. Un article badine : « La grosse Bertha fait plus de bruit que de besogne… Son silence nous est aussi indifférent que son vacarme… Bertha est un sujet de conversation pour les Parisiens, et pour les Boches un sujet de communiqué ». Mais voici mieux : « En entendant le gros canon, on dissimule mal une espèce de joie. L’événement met dans la vie monotone une excitation, un orgueil et presque un plaisir. Les physionomies moroses s’éclairent, les dos lassés se redressent. Il se répand dans les rues une allégresse ». Et des obus sont tombés sur une école enfantine, sur un asile de folles, sur une Maternité !

Les raids nocturnes excitent le même enthousiasme verbal. Depuis quelque temps, dès l’alarme, on hisse au-dessus de Paris des ballons captifs que les soldats appellent des « saucisses » et dont le fil doit contrarier le vol des avions