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manistes, des fureurs qui dépassèrent celles de nos nationalistes.

Mais c’est de cette politique de détente, de cette politique humaine, que les partis de guerre prennent ombrage, en France et en Angleterre. Elle gêne leurs vues, leurs plans. Elle leur est intolérable. C’est elle qu’ils veulent atteindre en lui. Clemenceau exécute au pouvoir les mesures qu’il réclamait dans l’opposition. Tragiquement, l’antagonisme des deux doctrines se concrète.

Foucard, administrateur innombrable, solennel et creux — il a, dit Paron, la majesté vide d’un ballon : du néant sous de la soie — déclare, la barbe horizontale :

— Il faut qu’il soit disqualifié.

Pour le perdre, les adversaires de Caillaux jouent de la trahison. J’imagine qu’ils n’y croient pas. Mais la foule y croit. En temps de guerre, cette idée de trahison se répand dans les masses comme un toxique foudroyant. Il semble même qu’elles en aient besoin, comme les malades ont besoin de morphine. Ce poison devient un baume sur les blessures de l’orgueil. La trahison explique tout : les échecs, les lenteurs, les mécomptes ; elle endosse toutes les fautes. Et elle satisfait aussi ces âcre instincts de défiance,