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d’avoir reçu quand il donnait des consultations ; ce nom qu’il s’est décerné lui-même, ce nom dont il signe, « Marat, l’ami du peuple », comme s’il était l’ami par excellence, le seul ami du peuple, comme s’il exerçait un privilège !

Ne s’est-il pas emparé d’un autre monopole, ne donne-t-il point à tous les Français des leçons de patriotisme, lui qui est né, en territoire prussien, d’une mère génevoise et d’un père sarde, d’origine espagnole ? Le cas est de tous les temps. Et Charlotte sourit amèrement de l’intolérable prétention. Car elle a le sens de l’ironie.

Mais, dira-t-on, il voit juste, de temps en temps ? Parbleu ! Il dénonce tous les jours. Il est pendu au tocsin. Son journal, ses pamphlets, ne sont qu’un cri d’alarme : « On nous endort. Prenons-y garde. C’est un beau rêve. L’affreux réveil ! » Quand un homme commet une faute, comment Marat ne l’aurait-il pas prévue, puisqu’il accuse tous les hommes de toutes les fautes ?

Mais, dira-t-on encore, disgracié par la nature, ne doit-il pas compatir mieux qu’un autre aux souffrances des humbles, à l’éternelle injustice dont ils sont victimes ? Il est