Page:Michel Corday - Charlotte Corday, 1929.djvu/124

Cette page a été validée par deux contributeurs.

a guidée, pour frapper ainsi du premier coup Marat droit au cœur ? » Elle réplique : « L’indignation qui soulevait le mien. »

Et lorsque ce même Chabot marque l’intention de garder pour lui sa montre d’or, elle se souvient qu’il fut d’église et le cingle : « Oubliez-vous que les capucins ont fait vœu de pauvreté ? »

Cependant, une épreuve l’attend encore : la confrontation. On la conduit dans la chambre, vivement éclairée, où déjà l’on doit faire brûler des aromates. On la met en face de ce masque, affreusement contracté par la mort et plus hideux encore que dans la vie. On découvre la plaie qui s’ouvre à droite dans la poitrine rongée de lèpre. Mais Charlotte est surtout bouleversée par les sanglots de cette femme affaissée au pied du lit, Simonne Evrard, la compagne de Marat, dont elle ignorait l’existence le matin même. Elle n’a point de remords, mais cette souffrance lui est intolérable. Elle s’irrite, impatiente de fuir : « Oui, oui, c’est moi qui l’ai tué… »

Il est minuit quand Drouet et Chabot la conduisent à la prison de l’Abbaye. On ouvre devant elle la porte cochère. De la rue, noire de nuit et de foule, s’élève une énorme cla-