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qui tourne le dos à la fenêtre. Sans préambule, il se renseigne sur l’insurrection normande. Il lui demande les noms des Girondins réfugiés à Caen, les écrit sous sa dictée.

Elle retrouve le masque qui la hante depuis dix mois, bien que l’âge et la maladie en aient encore aggravé l’horreur : le teint de plomb, les yeux jaunes et ronds, le nez écrasé sur la bouche de crapaud. Chacun de ses gestes découvre, sur le col et les épaules, la lèpre qui le dévore. C’est bien un monstre. C’est le monstre.

Mais Simonne Evrard se glisse dans la pièce. Est-elle poussée par un pressentiment ? A-t-elle pris un prétexte pour entrer ? Elle consulte Marat à propos d’un mélange de terre glaise et d’eau d’amande qu’il doit boire comme remède.

Pour la première fois, Charlotte regarde autour d’elle. Instinctivement, elle retient des détails : sur le papier pâle où sont peintes des colonnes torses, la carte de la France départementale, deux pistolets accrochés sous une inscription en grosses lettres : LA MORT. Quelle ironie.

Simonne Evrard quitte la pièce. Elle emporte, peut-être encore par crainte du poison,