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aux autres, la cloche de bois se balance muette, annonçant le réveillon de misère.

Le réveillon des loqueteux, des sans pain, de la ruche où les frôlons mangent le miel.

Qu’elle monte, qu’elle monte l’eau de la Seine en Océan ! qu’elle traîne des légions de spectres vers ceux qui les ont réduits à la mort, que la terre partout sue le sang dont elle est gorgée depuis toujours ; le sang des foules, qu’elle le rejette par tous les abîmes et que c’en soit fini pour toutes les iniquités passées en lois, toutes les sauvageries dites civilisation, tout ce qui rend entre eux les hommes pires que les bêtes farouches. Tocsins, tocsins sonnez la révolte !

Parfois, le paysan se lasse comme le bœuf de labour flairant l’abattoir, il devient terrible.

Le troupeau alors se rue sur les bouchers ; ce sont les jacqueries.

Il y en eut de terribles dont les plus braves subirent des traitements si épouvantables que des représailles eurent lieu parfois à des siècles d’intervalle.

Un épisode de la jacquerie de 1513, en Hongrie, semble évoqué par le récit des cruautés qui viennent de signaler la mort de Doï-Van.

Les paysans, au nom de toutes leurs misères passées et présentes, s’étaient levés armés de torches et de feux. La révolte d’une poignée d’hommes déterminés durait depuis un an. Mieux vaut disaient-ils dormir sous la terre que d’y marcher sous le fouet.

Jean Vaïvode de Transylvanie rassembla des forces nombreuses, une armée cerna les Jacques, Georges, Dosa, et quarante des siens furent fait prisonniers, on les condamna à mourir de faim.

La force était largement développée par les exercices violents, la faim se faisait cruellement sentir, c’est pourquoi on choisissait cette mort comme la plus engoiseuse.

Au bout de cinq ou six jours, neuf des condamnés étaient encore vivants, quelques-uns avaient mordu leurs bras de