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souvent heureux des couleurs. Sitôt que l’on rencontre une reliure du dix-huitième siècle avec des ornements en mosaïque, on s’empresse de l’attribuer à Padeloup ; c’est là une grosse erreur. Si bien remplie que soit une seule existence, elle ne suffirait pas à produire un aussi grand nombre de volumes[1].

Padeloup inaugura ce genre, cela est probable ; mais il y avait à cette époque, en dehors des membres des familles Padeloup et Derome[2], quantité de doreurs, et il est facile, même pour les personnes qui ne sont pas du métier, de reconnaître beaucoup de factures différentes.

Les Padeloup doublèrent de maroquin la plupart de leurs reliures riches, et les ornèrent de dentelles dont les fers du dix-septième siècle forment la base ; mais ils y joignirent une foule d’autres petits fers, vrais clous de rebut, qu’une longue pratique du métier avait agglomérés dans leur matériel, et dont l’assemblage est aussi étrange qu’il est de mauvais goût. Si pour le dessinateur, l’artiste, l’œuvre des Padeloup laisse trop de prise à la critique, ils justifièrent, au moins comme relieurs, leur grande réputation. Dignes héritiers des traditions du grand siècle pendant lequel le corps d’ouvrage avait fait tant de progrès, ils ont laissé d’excellentes reliures, et nous souhaitons à nos lecteurs beaucoup de volumes construits comme le Livre d’Église, aujourd’hui chez M. le baron Jérôme Pichon. Certes Jacques-Antoine Derome fit d’aussi bonnes reliures,

  1. Il en est des livres comme des meubles de Boule, que l’on attribue tous à Charles-André, lors même qu’ils sont de ses fils ou de ses neveux, qui furent ses élèves et imitèrent son genre, comme tous les ébénistes du dix-septième siècle.
  2. Voir aux Notes.