Page:Michel - Contes et légendes.djvu/60

Cette page a été validée par deux contributeurs.

travailler ; il y a des filles d’ouvriers qui sont plus avancées que toi. »

C’était la première fois qu’elle lui parlait de travail ; Euphrosine regarda sa mère avec étonnement.

« Travailler, dit-elle, est-ce que je n’ai pas une maîtresse pour m’apprendre tout cela ! »

Madame de Pouffard, toute sotte qu’elle était, sentit bien qu’avec un pareil raisonnement sa fille ne ferait par grands progrès : mais elle crut l’avoir assez moralisée ce jour-là, et elle pensait vaguement qu’à force de tourmenter Rose André celle-ci inventerait quelque moyen pour que la science vint tout de suite.

Euphrosine méritait bien qu’on fit cela pour elle.

Pendant plusieurs jours, la marquise de Pouffard parla des découvertes prodigieuses qu’on avait faites et qu’on faisait encore : elle confondit la vapeur avec l’électricité, attribua l’imprimerie à Christophe Colomb, la découverte de l’Amérique à Gutenberg, mais cette éloquence fut perdue, Rose ayant dit froidement que toutes ces choses avaient été trouvées justement par leur probabilité presque incontestable, tandis que d’autres étaient tout d’abord trouvées impossibles par le bon sens.

Madame de Pouffard peu satisfaite, se plongea dans la lecture d’un journal de modes qu’elle aimait beaucoup (La Feuille des Grâces).

Monsieur de Pouffard reprit l’examen de ses propriétés, dont il avait fait faire les plans soigneusement coloriés.

Rose reprit un ouvrage d’éducation, auquel elle travaillait, après avoir prévenu Mademoiselle Euphrosine que