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« Eh ben, oui, dit-elle, puisqu’il n’y a pas d’autre moyen ! » Rose ne dormit pas de la nuit. C’était vraiment une heureuse inspiration que celle qui l’avait conduite chez Jeannette.

Le lendemain, Rose conduisit chez son père, la centenaire et son neveu Jean-Claude, le vieux berger.

« Père, dit Rose, voici une société qui va t’égayer. Maintenant, ces bons vieillards demeureront avec nous. »

Blaise rougit et pâlit, et puis son cœur creva, comme on dit dans le village ; et il raconta, en fondant en larmes, comment de père en fils, recevant chacun le fatal récit et tous retenus par une mauvaise honte, ils n’avaient qu’aidé les descendants des malheureux avec lesquels son aïeul avait fait ces fatals marchés, et les terribles souffrances que chacun d’eux avaient endurées.

Jean-Claude pleurait d’attendrissement.

« Qu’à ça ne tienne, père Blaise, dit Jeannette, gna pu que nous deux, Jean-Claude et moi de ces familles-là, et je venons demeurer avec vous pour toujours. À preuve que je baillons en héritage à André et à Rose tout ce que vous croyez qu’est à nous, quoique vous en ayez donné petit à petit la valeur ; mais je sais pourquoi ça ne vous contentait pas. »

Il fut fait, comme le disait Jeannette. Voilà pourquoi Blaise ne mourut pas de tristesse, comme son père et ses grands-pères.

Et voilà pourquoi Jeannette, vêtue de ses plus brillants atours, c’est-à-dire d’une coiffe comme on en portait au