Page:Michel-Ange - L’Œuvre littéraire, trad. d’Agen, 1911.djvu/229

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
175
APPENDICES

Grand Dieu, si tu ne viens à mon aide, où trouverai-je, selon l’urgence, un guide assuré dans le cours de cette vie mensongère ? Où puiserai-je la force de changer de conduite, et de mœurs, et d’amour ?

Non, Seigneur ! ce n’est point assez d’avoir nourri dans mon âme cet immense désir de retourner au séjour où ta volonté la forma du néant ;

Il faut, de plus, avant que tu la dégages de ses liens mortels, il faut qu’un repentir sincère lui aplanisse la voie du ciel, et la rende plus certaine encore du bonheur qu’elle doit retrouver dans ton sein.


SONNET XXVII
Forse perche d’altrui…

Si mon âme, égarée par un guide infidèle, est déchue de sa dignité première, c’est pour m’apprendre peut-être qu’il faut, dans leurs erreurs, plaindre les hommes, au lieu de les blâmer.

Mais, Seigneur, où trouverai-je un appui, si tu me retires le tien ? Privé de ton amour tutélaire, je crains de succomber sous la révolte des sens.

Ah ! que le sacrifice de ta chair, que le mérite de ton sang et de ta fin douloureuse viennent effacer l’originelle tache !

C’est à toi seul que j’ai recours. Prends pitié de mon repentir, pardonne à mes iniquités, quand je suis si près de la mort et si loin de toi, ô mon Dieu !


SONNET XXVIII
Scarso d’una importuna…

Détaché du monde, libre enfin du poids importun et cruel qui m’accablait, je viens, Seigneur, comme un frêle esquif battu par la tempête, chercher le calme dans ton sein.

Ta couronne d’épines, tes mains par le fer mutilées, ta douce et divine face outragée, voilà, pour mon âme inquiète, le gage d’un repentir immense, l’espoir fondé de son salut.

N’arrête point, dans ta justice, ton divin regard sur mes crimes ; et que ma prière, entendue par ton oreille sainte, détourne loin de moi ton bras vengeur.

Lave dans ton sang mes souillures, proportionne enfin à mon âge la promptitude de tes secours et l’abondance de tes miséricordes.


SONNET XXIX
Mentre m’attrista e duol…

Quand le passé se retrace dans ma mémoire, quand le souvenir de tant de moments perdus sans retour vient frapper mon esprit, j’éprouve un sentiment mêlé de plaisir et d’amertume.

De plaisir, parce que, devançant les leçons du trépas, je vois enfin toute la vanité des jouissances du monde ; d’amertume, parce que je sens combien il est difficile d’obtenir, si près du tombeau, le pardon de tant de fautes.

Ah ! malgré tes saintes promesses, puis-je espérer, Seigneur, sans trop de témérité, qu’un repentir si tardif trouve encore grâce devant ton divin amour ?

Mais quoi ! ton sang versé pour nous ne nous apprend-il pas que, si ton martyre fut sans égal, ta clémence doit être sans bornes ?