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MICHEL-ANGE.

Si vous jugez à propos de lui montrer quelque chose, faites-le ; je ne veux vous astreindre à rien contre votre volonté. Vous savez comment sont taits les gens qui aiment les arts, ils sont insatiables quand il s’agit de voir ; et cela, vous pouvez facilement le lui pardonner. Pas autre chose. Jésus-Christ vous conserve en santé.

Votre Sébastien, peintre, à Rome.


V

Au seigneur Michel-Ange Buonarotti, sculpteur très digne, etc., à Florence.
Le 4 novembre 1520.0000

0000Mon très cher Compère,

Aujourd’hui même, j’ai reçu de vous une lettre, écrite le 3 du présent mois, et j’en ai tout compris. Je suis bien étonné que vous, connaissant mon compère Giovanni de Reggio comme vous m’en avez parlé une fois dans la Traspontina, vous confériez de vos affaires avec lui. Cela m’a bien étonné. Quoique maître Giovanni soit un brave homme, un homme de bien et qui vous aime, il ne me semble pas homme à conduire une de vos affaires. Il crie un peu trop, la nature l’a fait ainsi. Mais nous avons eu du bonheur ; car, ni lui ni moi, nous n’avons fait aucune démarche, ayant tout d’un coup reçu votre lettre avant cette dernière. J’allai au palais pour faire ce qu’il fallait, et notre Maître était parti avec ce camérier que je voulais voir. Cela nous a empêché de faire ce dont nous étions chargés. Ne craignez pas qu’il en résulte aucun désagrément pour vous ; il n’a rien été fait de ce que voulait maître Giovanni, sinon comme je vous l’ai écrit à vous et au compère Leonardo ; car, avant l’arrivée de Giovanni, je vous ai écrit les intentions de notre Seigneur.

Au retour de Sa Sainteté, je vous donnerai avis de tout ce qui surviendra, et, suivant ce qui arrivera, vous vous mettrez en route. Si je puis parler à notre seigneur une autre fois, comme je l’espère, je ferai ce qu’il faudra, comme me l’a dit le compère Leonardo ; mais il serait bon, je crois, que vous fissiez un tour par ici, pour voir comment vont vos affaires, car vous en feriez d’un seul coup plus de quatre, et sans difficulté.

J’ai été trouver maître Giovanni, je lui ai crié d’aller un peu plus doucement. Il m’a répondu qu’il n’avait pas fait autre chose que de solliciter le payement de la figure du Christ. Il m’a dit qu’il y a du désordre et que vous n’envoyiez pas la figure avant d’avoir reçu votre argent. Il a bien mené cette affaire, mais il va disant une chose qui me fâche ; il dit que ce n’est pas vous qui avez fait cette figure, qu’elle a été faite par Pietro Urbano. Prenez garde qu’il faut qu’elle paraisse de votre main, pour faire crever les fainéants et les bavards.

On dit de nouveau que Monseigneur Révérendissime Santa-Maria est mort [1].

Quant à ce que vous me répétez de votre terribilité, je ne vous crois pas terrible, pour mon compte ; et si je ne vous ai pas écrit à ce sujet, n’en soyez pas surpris, car vous ne me paraissez pas terrible, sinon dans l’art, c’est-à-dire que vous êtes le plus grand maître qui ait jamais été. C’est là mon avis. Si je me trompe, tant pis pour moi. Je ne vous dirai pas autre chose. Recommandez-moi au compère Leonardo et à messire Pier Francesco.

Votre très fidèle compère Bastiano, peintre, à Rome.


VI

Au seigneur Michel-Ange Buonarroti, sculpteur très digne, etc., à Florence.
Le 19 novembre 1520.0000

0000Mon très cher Compère,

Il y a déjà plusieurs jours que j’ai reçu de vous une lettre, à moi très agréable. Je vous remercie extrêmement de ce que vous avez daigné m’accepter pour votre compère : les

  1. Le cardinal Bernardo Dovizio de Bibbiena.