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APPENDICES

III

Au seigneur Michel-Ange Buonarotti, sculpteur très digne, etc., à Florence.
Le 7 octobre 1520.0000

0000Mon très cher Compère,

Maitre Giovanni de Reggio, mon compère, est venu à Rome et m’a parlé de bien des choses et surtout de ce que vous désiriez, en vertu d’un Bref de notre Seigneur, venir à Rome pour tel service qu’il plairait à Sa Sainteté. Je crois vous avoir donné, à vous et à notre compère Leonardo, toutes les informations possibles dans la dernière lettre que avez reçue de moi sur ce sujet. Il est vrai que maître Giovanni m’a dit que vous n’aviez pas eu ma réponse pendant qu’il était à Florence, car peut-être lui auriez-vous parlé d’une autre façon. Maintenant je vous réponds que j’ai fait entendre, aussi adroitement que possible, à notre maître qu’il donnât ce Bref, et Sa Sainteté dit qu’Elle ne veut pas vous déranger de vos travaux de Florence. J’ai fait observer à Sa Sainteté qu’en ce moment où monseigneur d’Agen vient de mourir, vous pourriez suspendre quelque temps le travail du tombeau. Le pape a dit au marquis et à moi qu’il ne voulait pas être nier à vous détourner de ce travail. De vous à moi, la vérité est qu’on dit tout bas que le cardinal a été empoisonné ; aussi notre maître ne se mêlera en rien des affaires du cardinal, pour ne pas provoquer de commentaires.

Ainsi, mon compère, si votre pensée est de venir à Rome, comme me l’a dit maître Giovanni, vous avez la meilleure occasion du monde d’y venir, à présent que ce cardinal est mort, pourvoir à vos affaires et comment le cardinal a laissé votre œuvre [1], car, autant qu’on peut comprendre, le cardinal n’a laissé aucun ordre pour ses affaires ; il ne s’attendait pas à mourir, et il est mort, comme cela, à l’improviste. Il serait très convenable que vous vinssiez voir ce qui vous concerne, au sujet du tombeau comme de toute autre chose, surtout de celle que vous savez. Et puis il y a encore un certain château de Canossa dont m’a parlé maître Giovanni ; vous avez là un beau sujet de vous mettre le cerveau en combustion. Quand vous seriez à Rome, vous mettriez fin à toute chose et vous obtiendriez tout ce que vous voudriez, non des châteaux, mais une ville ; car je sais en quelle estime vous tient le pape. Quand il parle de vous, il semble parler d’un frère, presque avec les larmes aux yeux. Il m’a dit, à moi, que vous avez été élevés ensemble, et il fait voir qu’il vous connaît et vous aime ; mais vous faites peur à tout le monde, même aux papes. Je ne vous dirai pas autre chose que cela. Vous savez, je pense, que notre maître est allé hors de Rome ; à son retour je crois que notre affaire se résoudra, et je vous donnerai aussitôt avis de toute chose. Rien de plus. Recommandez-moi au compère Leonardo et à messire Pier Francesco. Jésus-Christ vous conserve en santé.

Votre très fidèle compère Sébastien, peintre, à Rome.


IV

Au seigneur Michel-Ange Buonarotti, sculpteur très digne, etc., à Florence.
Le 4 novembre 1520.0000

0000Mon très cher Compère,

J’ai reçu de vous une lettre, qui était la réponse à l’avant-dernière que je vous ai écrite, et j’ai compris le tout ; mais elle est arrivée trop tard, parce qu’on ne peut faire ce dont m’avait chargé le compère Leonardo. Notre maître, aussitôt après avoir fait l’Office des Morts, est parti à cheval ; je crois qu’il restera quelques jours absent, et, quand il reviendra, je ferai aussitôt votre commission.

Le présent porteur est un gentilhomme vénitien qui désire vous connaître, au moins vous voir, et m’a prié de vouloir bien vous écrire pour avoir l’occasion de vous connaître. C’est un homme d’excellentes manières, fort lettré surtout et qui aime beaucoup les arts.

  1. S’il a laissé quelques instructions ou pris quelques dispositions, au sujet de votre œuvre du tombeau de Jules II.