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MICHEL-ANGE.

tiens boutique, il ne me semble pas qu’il soit bon de perdre du temps (en chemin).

0000(Arch. Buonarroti.)


Rome, 2 mai 1545.0000

J’ai reçu la corbeille de poires. Il y en avait 86. J’en ai envoyé au pape 34, qui lui ont paru belles et fort bonnes. Quant à la corbeille de fromages, la douane dit que le voiturier est un fourbe et qu’il ne l’a pas déposée en douane. Si je peux savoir où il se trouve dans Rome, je lui ferai selon son mérite, non pour le fromage, mais pour apprendre à ce ladre à mieux traiter l’humanité. J’ai été très mal, ces jours derniers ; je me sentais bien éprouvé par une rétention d’urine. À présent je vais mieux et je te l’écris, de peur que quelque bavard ne t’en raconte mille mensonges à te faire sauter. Dis au prêtre de ne plus m’écrire à Michelagnolo, sculpteur, parce que je ne suis connu que sous le nom de Michel-Ange Buonarroti ; et aussi parce que, si un citoyen florentin veut faire peindre une table d’autel, il faut qu’il s’adresse à un peintre. Moi, je n’ai jamais été ni peintre ni sculpteur, comme ceux qui tiennent boutique. Je m’en suis toujours défendu, par honneur pour mon père et pour mes frères, et je n’ai pas moins servi trois papes, — encore que contraint…

0000(Ibid.)


Rome, 1548.0000

Je n’ai pu ni su lire ta dernière lettre, et je l’ai jetée au feu ; c’est pourquoi, je ne puis y répondre. Je t’ai souvent écrit que, chaque fois que je reçois une de tes lettres, j’ai la fièvre jusqu’à ce que j’aie fini de la déchiffrer. Aussi bien, je te dis de n’avoir plus dorénavant à m’écrire. Si tu as à me faire savoir quelque chose, prends quelqu’un qui sache écrire, car j’ai la tête à autre chose qu’à la perdre sur tes lettres. Messer Jean-Francesco m’apprend que tu voudrais revenir à Rome, pour quelques jours. Sachant que tu es en compagnie, comme tu me l’as écrit, je m’étonne que tu puisses partir. Aie bien soin de ne pas jeter par les fenêtres l’argent que je t’ai envoyé. Gismondo aussi doit en avoir soin, car qui ne l’a pas gagné n’en connaît pas la valeur, et l’expérience prouve que la plupart de ceux qui naissent dans la richesse, la dispersent et meurent ruinés. Ouvre bien l’œil et pense dans quelle misère et fatigue je vis, étant vieux comme je le suis.

Ces jours derniers, un Florentin est venu me parler d’une fille des Ginori à laquelle on t’aurait déjà intéressé, dit-il, et qui te plairait. Je ne crois pas que ce soit vrai, et, sans autres renseignements, je ne puis te donner un conseil. Mais il ne me plaît pas que tu prennes pour femme une personne dont le père ne te donnerait pas une dot convenable, si elle était une fois promise. Je voudrais qu’on pensât bien plutôt à la femme qu’à la dot. Il me semble qu’il t’appartient, mieux à toi qu’à un autre, de chercher femme sans t’inquiéter si la dot est petite ou grande. Tu dois surtout rechercher la santé du corps et de l’âme, la noblesse du sang, les mœurs et les parents de cette femme : c’est là surtout ce qui importe…

0000(Musée Britann.)