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MICHEL-ANGE.

leure que la mienne. De toute manière, mon avis est que tu l’acceptes ; mais garde-toi d’être trompé, car on ne trouve pas aisément qui voudrait plus de bien à autrui qu’à soi-même. Tu me dis qu’un tel autre voudrait te donner aussi sa fille pour femme ; et moi je te dis que toutes les offres qu’il te fait, te manqueront, la femme excepté, quand il t’aura mis celle-ci sur le dos. De ces partis, tu en auras autant que tu en voudras. Je te dirai encore qu’il ne me plait pas de te voir te mettre, par calcul, en embarras avec des hommes beaucoup plus vils que tu ne peux l’être. L’avarice est un bien grand péché ; là où il y a péché, il ne peut y avoir bonne réussite. Il me semble que tu devrais donner de bonnes paroles et suspendre cette affaire jusqu’à ce que je voie la fin des miennes ici et me rende compte de la situation. Ce sera dans trois mois, ou à peu près. En attendant, fais à ta guise. Je n’ai pu te répondre plus tôt.

0000(Arch. Buonarroti.)



VIII

Rome, 24 juillet 1512.0000

… Je serai, en septembre prochain, à Florence, et je ferai tout ce que je pourrai pour vous, comme je l’ai fait jusqu’à cette heure. Je suis las, plus qu’aucun homme ne le fut jamais. Cette grande fatigue ne rend pas ma santé meilleure, et pourtant j’attends venir avec patience la fin si désirée. Vous pouvez bien patienter aussi deux mois, vous qui êtes dix mille fois mieux portants que moi-même.

0000(Arch. Buonarroti.)



IX

Rome, 18 septembre 1512.0000

J’ai appris par ta dernière lettre comment le pays (florentin) était en grand péril, et j’en ai eu grande compassion. À présent, on dit que la maison des Médicis est de nouveau entrée dans Florence, et que tout s’est arrangé. Aussi bien, je crois que le danger qui nous venait des Espagnols a cessé, et je ne pense pas qu’il soit encore besoin de quitter le pays. Tenez-vous-y en paix, ne vous y faites les amis, les familiers de personne, sinon de Dieu. Ne parlez de personne ni en bien ni en mal, parce qu’on ne sait jamais la fin des choses. Ne vous occupez que de vous. Au sujet des 40 ducats que Ludovic (son père) a prélevés à Sainte-Marie-Nouvelle, je vous ai écrit, l’autre jour, une lettre pour vous dire qu’en cas de péril de la vie vous en dépensiez, non pas quarante, mais tout le reste. Hors ce cas, je ne vous donne pas la permission d’y toucher. Je vous avise que je n’ai pas même pour moi un grosso et que je suis littéralement sans chaussures et nu, et que je ne peux avoir mon reste si mon ouvrage n’est pas fini. Je souffre vraiment les plus grandes privations et fatigues. Aussi bien, quand vous auriez à supporter quelques ennuis, ne vous en rebutez point. Tant que vous pourrez vous aider de vos