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MICHEL-ANGE.

lire, tu aurais fait le possible de l’impossible (quelques mots indéchiffrables)… et, comme on dirait, fait du feu dans l’eau.

De tout cela, Dieu soit loué ! Je ne t’écris point ceci parce que je voudrais de toi quelque chose. Mais j’avais besoin, une fois pour toutes, de t’ouvrir mon âme et aussi parce qu’il me semble que tu me prends pour un pauvre malheureux. Et je le suis vraiment, mais cependant pas au point que, de longtemps, je puisse te dire que j’aie beaucoup goûté ce que tu m’as écrit. Je ne trouve pas que tu m’aies tenu ce que tu m’avais donné à entendre. Si tu crois que ma mémoire s’en est allée avec le temps, admettons-le. Et pourtant j’en ai encore tant, que je me rappelle bien d’autres choses. Mais assez, là-dessus.

Si j’ai quelque argent, j’espère venir à Rome pour le jubilé. Mais si j’allais venir au moment où tu t’en retourneras (un mot illisible). En tout cas, je ne viendrai que si j’ai assez d’argent pour l’aller et le retour, et sans avoir à te donner l’ennui de me recevoir chez toi. Si j’y vais, ce sera seulement pour le moment du Pardon que je compte arriver, si je peux espérer de l’obtenir. Mais ne pense pas à ce voyage, car, comme je te l’ai dit, je ne le ferai que lorsque j’aurai assez d’argent pour aller et venir. Je t’écris ceci parce que j’ai cru comprendre dans ta lettre ton appréhension, à ce sujet. J’en ai assez dit. Je me suis même un peu trop échauffé. Tu me pardonneras. Je n’ai pour toi que compassion et non aucun autre désir ; mais je te compatis, à la pensée que, depuis si longtemps, selon ce que tu m’écris, tu es sans pain. Si tu étais resté à la maison, peut-être aurais-tu à toi quelque chose sans avoir pâti tant de mauvais jours et couru tant de dangers. Certes, le renom te vaudrait mieux chez toi, dans ta maison bien à toi, que celui qui te vaut la pauvreté ailleurs. La belle affaire, comme on dit, d’être à Florence et d’avoir son à Milan ! En tout, fais à ta volonté, car tu sais mieux que moi ce que tu as à faire. Et que Dieu soit loué, pour le reste. Rien de plus à te dire.

Que le Christ te conserve.

0000(Archives Buonarroti.)