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étions invites à donner au pilote une gratification de cinquante ou soixante piastres.

Que pensez-vous, mon cher ami, de la justice de Gallipoli ? croyez-vous que Salomon eût jugé autrement ? J’ai remercié notre magistrat israélite de sa décision. Il m’a remercié à son tour de lui avoir donné une occasion d’exercer son ministère. « Voila près de quarante ans ; m’a-t-il dit, que je n’ai fait acte de consul. » Il ajoutait que, dans sa jeunesse, on ne voyait dans l’Hellespont que des navires de France ou de Venise. Le pavillon vénitien avait été remplacé par le pavillon d’Autriche, qui se montrait encore quelquefois ; mais le pavillon français ne paraissait presque plus dans le Levant.

Après le jugement rendu, nous sommes venus nous établir dans un kioske charmant, bâti sur la mer. C’est le plus beau café de Gallipoli et peut-être de l’Hellespont. Nous y avons déjeûné avec des provisions fraîches, qu’on trouve plus abondamment dans cette ville que dans les cités de la côte d’Asie. Les Turcs que nous avons vus au café, n’ont eu pour nous que des paroles bienveillantes, des procédés polis et presque affectueux. Quoique Gallipoli et Lampsaque ne soient séparés que par la largeur du canal, on remarque au premier aspect une très-grande différence entre les deux cités. D’un côté, on ne voit qu’une population silencieuse et désœuvrée ; de l’autre, on aperçoit partout le mouvement du commerce et de l’industrie. À